L' HOMME

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LE GENERAL GEORGE S. PATTON ET LA FRANCE

La France a toujours tenu une place spéciale dans le cœur du Général George S. Patton. Il fut élevé avec les histoires de Napoléon, parlait français, visita le pays quand il était jeune officier, y perfectionna sa pratique de l’escrime et combattit deux fois pour la liberté de ce pays, lors de la première et de la deuxième guerre mondiale.

Patton fit connaissance avec la langue française dans son enfance, bien qu’il ne l’ait pas maitrisée avant de devenir officier dans l’armée. Son père avait enseigné le français à l’institut militaire de Virginie en 1877 et le jeune Patton étudia plus tard le français à l’école classique de garçons de Pasadena en Californie. Jeune étudiant, il écrivait des dissertations sur des batailles et incluait les récits du Chevalier Noir combattant les Normands.

Patton refit connaissance avec la langue française lorsqu’il rencontra sa future épouse, Béatrice Ayer. Il avait dix-sept ans et elle en avait seize, mais Patton trouva qu’elle ressemblait trop à une petite fille, à toujours trimballer une poupée de porcelaine. Ce qu’il ne savait pas c’est qu’elle l’avait gagnée pour avoir parlé exclusivement français pendant une semaine. Elle avait déjà voyagé à travers l’Europe et certaines parties du Moyen Orient lorsqu’ils se rencontrèrent.

Tandis que Patton poursuivait sa carrière de soldat, il se comparait souvent à Napoléon, tirant des leçons de la vie du chef français et analysant ses batailles. Une fois il se plaignit que les autres cadets ne le prenaient pas au sérieux, contrairement à Napoléon, que ses camarades de classe considéraient comme un meneur d’hommes. Plus tard, dans une dissertation il déplora que d’autres cadets ne prennent pas l’étude de l’histoire militaire au sérieux, alors que “comme le disait Napoléon, c’était la seule école de guerre” . A la remise des diplômes, il nota pour lui-même : “Napoléon n’a jamais négligé un détail. Quand il n’arrivait pas à gagner un homme à sa cause, il faisait au moins en sorte d’en donner l’apparence aux autres. Il n’est pas de victoire trop petite.”

Patton a participé au Jeux Olympiques de 1912 à Stockholm en Suède au pentathlon moderne, composé de cinq épreuves : tir au pistolet, 300 mètres natation, escrime, équitation (course d’obstacle) et course à pied (≈ 4000 mètres). Il termina cinquième sur 42 concurrents, mais lors de la compétition d’escrime, il battit une fine lame française, concurrent de niveau international.

Au lieu de retourner chez lui après les jeux, Patton vint en France pour améliorer sa pratique de l’escrime sous la direction de Monsieur l’Adjudant Cléry, qui était considéré comme l’un des meilleurs escrimeurs de toute l’Europe. Cléry enseignait à l’Ecole de Cavalerie de Saumur, que Patton considérait comme le “must” pour tous les cavaliers militaires américains. Patton prit des leçons particulières avec Cléry et observa ses classes aux cavaliers – le Cadre Noir.

Patton retourna à Saumur l’été de 1913 pour suivre officiellement les cours de l’Ecole de Cavalerie. Une fois en France, sa femme et lui passèrent quelques jours à Saint-Lô, et achetèrent des meubles. Quand Patton termina sa formation il reçut le titre de Maitre d’Escrime. Bien qu’étant seulement Lieutenant, il était l’escrimeur le plus expérimenté de l’Armée américaine. Lorsqu’il ne perfectionnait pas son maniement de l’épée, Patton visitait la campagne française avec son épouse. Lorsqu’il eut terminé ses études, ils partirent en voiture dans la péninsule bretonne et en Normandie, visiter des lieux où il combattrait en 1944.

Lorsque la guerre éclata en Europe en 1914, Patton demanda au Chef d’état-major de l’Armée de le laisser rejoindre les combats. “Je souhaite participer à la guerre en France” écrivit-il. “Je connais plusieurs officiers français dans de nombreux régiments qui m’accepteraient si j’apporte ma contribution.” Sa demande fut rejetée et il dut attendre que les Etats-Unis rejoignent la cause des alliés en 1917.

Patton commença la 1ère guerre mondiale en tant qu'Assistant du Général John J. Pershing, Commandant de la Force Expéditionnaire Américaine. Il arriva à Paris avec le Général Pershing et l'aida à établir son quartier general dans un immeuble situé face à l'église St Louis des Invalides. Chaque matin Patton se rendant à son bureau passait saluer la tombe de Napoléon. Quelques mois aprés leur arrivée, le QG de la Force Expéditionnaire Américaine fut ensuite déplacé à Chaumont.C'est alors qu'il posa sa candidature pour le nouveau Corps de Chars d'Assaut Américain, devenant le premier officier américain à le joindre.

En sa qualité de Commandant d’unité de chars, Patton visita des usines françaises de chars, étudia la tactique des tanks et fit même un voyage à Cambrai, lieu de la première offensive de chars d’assaut de la guerre. Il créa une école américaine des tanks à Langres et forma bientôt de nouveaux conducteurs de chars dans les environs du hameau de Bourg. “Le Corps de chars d’assaut - écrivit-il dans son journal- sera discipliné pour le moins”. Vers la fin du mois d’août, il avait suffisamment d’hommes bien entrainés et de chars français Renault FT-17 pour former la 1ère Brigade Légère de chars.

Patton conduisit ses chars à la bataille pour la première fois le 12 septembre 1918 à la bataille de Saint-Mihiel. Le temps était brumeux alors il décida d’avancer avec ses chars au lieu de rester à son poste de commandement. Il aida à dégager les chars de la boue et avança à travers les barrages d’artillerie et le feu ennemi. Lorsque certains de ses tankistes refusèrent de traverser un pont en dehors de la ville d’Essen, Patton le traversa à pied. Il monta ensuite sur l’un des tanks et le guida dans la ville de Pannes, où il fit 30 prisonniers allemands. Il était encore sur le char lorsque des allemands commencèrent à le mitrailler. Il sauta du char tandis que celui-ci avançait. Il essaya sans succès de faire avancer l’infanterie avec le char puis se précipita tout seul à sa suite et fit revenir les conducteurs. La bataille se termina le jour suivant.

Les tanks de Patton avaient aidé à gagner la bataille mais on n’avait pas trop le temps de fêter ça. L’offensive de Meuse-Argonne était prête à être lancée le 26 septembre. Patton prit à nouveau la tête de ses hommes pour les encourager et coordonner l’attaque. Voyant des hommes battre en retraite, il les ramena dans la bataille jusqu’au pied de la colline. Là, il se découvrit pour creuser une tranchée et la rendre franchissable pour ses chars. Maintenant qu’il avait le soutien de ses chars, Patton mena son groupe au feu de l’ennemi. Tout autour de lui, les hommes tombaient, quand soudain, il fut touché par une balle à la cuisse gauche. Blessé et allongé dans une tranchée, il continua à diriger la bataille et refusa l’évacuation vers un hôpital jusqu'à ce qu’il puisse faire son rapport à ses supérieurs. Ses actions lui valurent la Croix de Distinction en Service. Il s’était rétabli et écrivait un mémoire sur la tactique des chars quand il apprit que la guerre était terminée le 11 novembre 1918 - jour de son anniversaire.

Après la guerre, l’Armée américaine dispersa le Corps de chars et Patton retourna à la cavalerie. Il lui resta fidèle jusqu’à ce que la guerre éclate à nouveau en Europe en 1939. Il servit ensuite d’arbitre durant de grandes manœuvres de l’armée en Georgie et en Louisiane et vit que les chars avaient à nouveau un rôle à jouer sur les champs de bataille modernes. Il prit le commandement d’une brigade blindée dans l’une des premières divisions blindées du pays, avant de recevoir le commandement de la division elle-même. Il prouva la valeur de son unité dans de nouvelles manœuvres et elle était prête à combattre lorsque les japonais attaquèrent Pearl Harbor à Hawaii, le 7 décembre 1941.

Patton fut bientôt promu Commandant de Corps et fut chargé du débarquement des troupes américaines sur le continent nord africain. Le 9 novembre 1942, à la tête du Corps Expéditionnaire Occidental pour l’Opération Torche, Patton débarqua avec succès près du Maroc et envahit le pays. L’armée française de Vichy qui défendait cette zone combattit vaillamment mais capitula bientôt devant Patton, à nouveau le jour de son anniversaire, le 11 novembre. Il fut impressionné par les généraux français et la capacité au combat de l’armée et de la marine françaises. Il prit finalement le commandement du 2nd Corps Américain et le conduisit à la victoire contre les allemands et les italiens.

Pour l’invasion de la Sicile, Patton fut promu Commandant à part entière de l’armée de terre et dirigea sa 7ème Armée sur deux fois plus de champs de bataille que son rival, le Général britannique Bernard Law Montgomery. Il captura même la ville portuaire de Messine, ville clé de la campagne, avant Montgomery. Après la campagne, Patton fut privé de commandement pour avoir giflé deux soldats. Il passa son temps à voyager autour de la Méditerranée.

Durant son exil, Patton visita la Corse, berceau de Napoléon, pour toucher le lit où le chef militaire français était né. En Egypte, il visita les grandes pyramides mais ne fut pas impressionné par leur taille. Une seule chose lui importait concernant les pyramides : “Napoléon y avait été.”

Patton retourna en France le 6 juillet 1944, un mois après le jour du débarquement. Atterrissant sur une piste temporaire près d'Omaha Beach, il dut attendre plusieurs semaines supplémentaires pour que sa 3ème Armée soit opérationnelle. Il attendit son heure dans une pommeraie à Néhou, visitant le front et révisant les plans d'offensive qu'il avait élaboré avec son état-major en Angleterre depuis le 22 janvier, date de sa nomination à ce nouveau commandement. Le Général Omar Bradley qui bientôt le commanderait dans la bataille, fut nommé Commandant de l'ensemble des forces américaines en Normandie.

Le 25 juillet, Bradley lança "l'opération Cobra", conforme aux plans de Patton ; une grande attaque aérienne sur les lignes ennemies entre Périers et Saint-Lô, suivie d'une attaque terrestre. Malgré de lourdes pertes alliées, le plan fonctionna. Tandis que les américains commençaient à repousser le front, Patton pouvait enfin passer à l'action avec toute sa 3ème Armée, plus rien n'allait l'arrêter jusqu'en Allemagne.

Alors que les autres armées alliées étaient retenues par les allemands, l’armée de Patton se déploya. Il expédia un corps en Bretagne, une force blindée à Rennes, puis à Lorient distante de 16 km et une autre à Brest à 322 km. La division blindée attaquant Lorient y bloqua les allemands qui résistèrent jusqu'à la fin de la guerre. Patton expédia ensuite deux corps à la brèche d’Avranches. Les deux unités entamèrent la résistance des allemands, les renversèrent et les dispersèrent. Un des corps avança de 27 km jusqu’au Mans.

Les supérieurs de Patton lui ordonnèrent d’abandonner la direction sud-est et de diriger son armée au nord, dans l’espoir d’encercler les allemands. Patton protesta, voulant continuer sa percée, si possible jusqu'à la Seine avant de refermer le piège qui serait connu sous le nom de “poche de Falaise”. Mais les chefs alliés s’inquiétèrent d’un plan si audacieux. Patton se laissa fléchir et envoya ses troupes au nord, prenant Alcyon et terminant le 13 août à Argentan. La voie semblait ouverte, mais Patton avait déjà franchi la limite placée par Montgomery pour éviter que ses troupes et celles de Bradley ne se mélangent. Bradley ordonna à Patton de s’arrêter et Patton s’y conforma.

Insatisfait de la complaisance de Bradley, Patton demanda l’autorisation de continuer vers l’est pour tenter un plus grand encerclement. Le 14 août, avec la bénédiction de Bradley, Patton envoya trois unités attaquer vers l’est à Dreux, Chartres et Orléans. Deux jours plus tard, elles avaient toutes atteint leur destination. Patton qualifia cette poursuite de “probablement la plus rapide et la plus grande de l’histoire”. Il avait raison : aucune armée ne s’était jamais déplacée aussi vite et avec autant d’élan.

Bien que les canadiens et les américains aient assuré une liaison fragile le 19 août sur la “poche de Falaise”, ils ne purent la consolider avant le 21 août. Les allemands y perdirent environ 50.000 hommes, mais presque 100.000 autres s’en échappèrent. Si Patton avait été autorisé à avancer vers le nord comme il l’avait demandé à l’origine, les alliés auraient pu capturer ou détruire l’armée allemande de l’ouest. Eisenhower, Bradley et Montgomery n’avaient pas la détermination de Patton, la volonté de prendre de grands risques, ni la confiance que Patton avait dans ses hommes.

Pendant ce temps-là, Patton envoya un corps à Mantes, à 48 km de Paris. Il voulait envoyer deux divisions sur la Seine pour empêcher les allemands de la traverser, mais là encore, ses supérieurs jugèrent l’action trop risquée. Il fut autorisé à en envoyer une sur la Seine et l’autre sur la rive gauche dans une tentative inefficace de bloquer la sortie. Les allemands s’étant échappés reviendraient harceler les alliés occidentaux dans quatre mois. Paris était libéré et, bien que les gros titres aient annoncé la libération de la ville lumière par Patton, ce fut en réalité la 1ère Armée du Général Courtney Hodge qui entra dans la ville.

Au lieu de cela, Patton attaqua à l’est, couvrant 112 km en une seule journée et traversa la Seine avant que les allemands ne puissent détruire les ponts. Il continua vers l’est sur les champs de bataille où il avait combattu lors de la première guerre mondiale. Troyes, Reims et Chalons tombèrent rapidement. La résistance allemande en France s’effondrait. Patton espérait traverser la Moselle entre Nancy et Metz mais fut arrêté dans son élan, mais non par les allemands.

L’avance rapide de Patton distança les matériels qu’on déchargeait encore sur les plages de Normandie. Même le « Red Ball Express », un convoi de camions transportant les matériels aux unités combattantes, ne pouvait suivre l’allure de l’avance alliée. L’attaque de Patton piétina jusqu’à la Meuse, qu’il traversa le 31 août.

Patton était désespérément proche de la ligne Siegfried, défense de la frontière allemande qui à ce moment là était sans surveillance. Il supplia Bradley de lui fournir environ 16.000 hectolitres de carburant, promettant d’être en Allemagne en deux jours, mais il n’y avait pas de carburant disponible. Eisenhower avait décidé de soutenir l’avancée de Montgomery dans le nord, qui visait le port d’Anvers et les sites de lancement des bombardiers allemands V-1 et V-2.

Durant la poursuite en France, Patton trouva le temps de visiter les villes où il avait séjourné durant la première guerre mondiale. Il salua des amis français dans le village de Bourg, se rendit à l’ancien quartier général de Chaumont, et refit une partie du chemin qu’il avait emprunté pendant l’offensive de Meuse-Argonne. Il visita aussi d’anciens châteaux français sur la route de la 3ème Armée.

Tandis que Nancy tombait le 15 septembre, Metz, avec ses défenses de la première guerre mondiale, tint bon jusqu'à mi-novembre. Patton passa son temps à visiter avec enthousiasme les unités de son armée. A la fin du mois d’octobre, Bradley lui rendit visite et lui dit qu’il pouvait attaquer à nouveau. “Je me sens plus jeune de 40 ans” écrivit-il à Béatrice.

Patton prévoyait d’attaquer le 8 novembre avec dix divisions. La nuit précédant l’attaque, comme il pleuvait à verse, plusieurs de ses commandants le supplièrent de retarder l’attaque et d’attendre une amélioration du temps. Patton refusa et alla se coucher. Quand il se réveilla au son de l’artillerie de la 3ème Armée, il remarqua que la pluie avait cessé. Mais l’éclaircie ne dura pas. A la tombée de la nuit, la pluie recommença et trempa ses hommes qui essayaient d’entamer les lignes allemandes. La “boue liquide” et la ferme résistance des allemands rendit difficile la progression de la 3ème Armée en cette fin novembre et début de décembre.

Les choses changèrent pour Patton le 16 décembre quand trois armées allemandes attaquèrent en Belgique et au Luxembourg (Bataille des Ardennes). Patton dirigea la majorité de son armée vers le nord et décima la section sud de la ligne allemande, soulageant ainsi la 101ème Division Aéroportée à Bastogne le lendemain de Noël. Il continua au nord et à l’est au cœur des attaques allemandes et contribua à conclure la Bataille des Ardennes vers la mi-janvier.

Patton avait la situation si bien en main qu’après la contre-offensive des Ardennes il fit une pause en février 1945 et passa quelques jours à s’amuser à Paris. Durant les trois derniers mois de la guerre, il mena son armée en Allemagne, en Tchécoslovaquie et en Autriche. La guerre prit fin le 9 mai 1945.

Les français n’ont jamais cessé de manifester leur respect et leur gratitude pour Patton qui avait aidé à libérer leur pays. En octobre il se rendit à Paris pour recevoir le titre de “Grand Officier de la Légion d’Honneur.” En novembre il fut fait Citoyen d’Honneur des villes de Chartres et Metz, à laquelle il rendit le trésor de sa cathédrale.

Après ses voyages en France, de retour en Allemagne, en allant chasser avec quelques collègues, Patton eut un accident de voiture qui le laissa paralysé. Il mourut le 21 décembre 1945.

Durant la deuxième guerre mondiale, Patton libéra plus de territoire français que n’importe quel autre Général allié. Il avait une affection fidèle pour le peuple français, et une fascination pour l’histoire militaire française. Aujourd'hui il y a de nombreux monuments et statues de Patton dans les pays de l’Europe libérée. Les bornes kilométriques le long de la “Voie de la Liberté” d’Utah Beach à Bastogne portent l’insigne de la 3ème Armée de Patton. Le peuple français sera toujours reconnaissant à Patton pour avoir libéré son pays.